Le divorce pour faute
- Maître Pascale DRAI ATTAL

- 30 sept.
- 4 min de lecture
L'histoire du divorce pour faute et les modalités requises pour l'obtenir

Le divorce dans le système juridique français : de la Révolution française à aujourd'hui
Le divorce n'a pas toujours fait partie du système juridique français, car son acceptation dépend de la conception du mariage. Avant la Révolution française, le mariage était, sous l’influence du christiannisme, considéré comme un sacrement et le divorce n'était donc pas admis en droit français. A la révolution française, le mariage a été considéré comme un contrat civil et laïc, conception ayant permis d’admettre le divorce. Napoléon et les rédacteurs du Code civil ont également prévu le divorce mais uniquement dans des cas précis et limités.
Sous la 2nd Restauration, Le divorce a été aboli par la loi Bonald de 181, et il faudra ensuite attendre la IIIème République pour que le divorce soit définitivement rétabli par la loi Naquet du 27 juillet 1884. Jusqu’en 1884 toutefois, le divorce pour faute était le seul type de divorce admis. Le Code civil énumérait trois fautes susceptibles de justifier le prononcé du divorce : l’adultère, la condamnation à une peine afflictive ou infamante, les excès, sévices ou injures graves.
Afin d’adapter le droit français à l’état des mœurs, le droit du divorce a donc été profondément réformé par la loi du 11 juillet 1975 avec un objectif de libéralisation du divorce (idée qu’il faille laisser aux époux le choix dans la manière de mettre fin à leur mariage) et de dédramatisation (effets du divorce dissociés en grande partie de la considération des torts des époux). Le divorce pour faute s’empare donc du titre du plus ancien cas de divorce admis en France.
Les fautes invoquées dans le divorce pour faute
Pour que le divorce pour faute soit prononcé, il doit logiquement y avoir une violation des devoirs et des obligations du mariage par l’un des époux (article 242 C. civil). Parmi les fautes invoquées qui peuvent justifier le prononcé du divorce, on peut citer :
L’infidélité, qu’il s’agisse d’une aventure ponctuelle, d’un comportement habituellement volage voire du concubinage de votre conjoint.
L’abandon du domicile conjugal, qu’il s’agisse d’un départ définitif ou temporaire de votre conjoint (Cass. civ. 2ème 30 novembre 2000).
La violation du devoir d’assistance si votre conjoint a refusé de vous soigner ou de vous rendre visite alors que vous étiez malade ou hospitalisé.
Les dépenses exorbitantes et la dissimulation d’un gros gain traduisent un manquement du conjoint au devoir de contribuer aux charges du mariage.
Les violences physiques portées volontairement au conjoint, aux enfants ou à leur entourage proche (coups et blessures, dégradations matérielles…).
Les attitudes moralement offensantes (injures, humiliations, dénigrements), si le conjoint a une attitude de rejet envers les enfants, a été condamné ou à une pratique religieuse excessive qui affecte la vie familiale, le divorce peut être prononcé.
Il faut toutefois noter que les griefs que vous allez invoquer peuvent être postérieurs à l’introduction de la procédure (soit postérieurs à l’ordonnance de non conciliation ou d’assignation). Cependant, parfois, les fautes peuvent être excusées ou neutralisées par le comportement de l'autre conjoint ou par la réconciliation.
Parfois, il arrive que les fautes d’un des époux soient excusées par le comportement de l’autre, par exemple, l’adultère du mari dont l’épouse était alcoolique, le refus de la femme d’avoir des relations sexuelles avec son mari coupable d’infidélités à répétitionetc… De même, le comportement fautif peut avoir été neutralisé par la réconciliation des époux, celle-ci se manifestant par une reprise de la vie commune et une véritable volonté de pardonner à l’autre. Toutefois, si votre conjoint effectue des visites régulières au domicile familial dans l’unique but de voir ses enfants, on ne peut pas parler de réconciliation… Il est possible de présenter une demande en divorce en raison de faits fautifs survenants ou découverts après la réconciliation. Dans ce cas, les faits initialement pardonnés redeviennent fautifs et peuvent être invoqués.
En somme, pour qu'un divorce pour faute soit accordé, les actes fautifs doivent être soit très graves, soit répétés. De plus, ils doivent être imputables à l'autre conjoint et rendre insupportable la vie commune (article 242 du Code civil). Ainsi, l’attitude injurieuse d’un époux à l’égard de l’autre ne donne pas lieu à divorce lorsqu’elle a pour cause une maladie mentale.
Les types de preuves admises pour démontrer l'adultère dans un divorce pour faute
Parmi les fautes invoquées dans un divorce pour faute, l'adultère est certainement la plus courante. Si vous êtes victime de l'adultère de votre conjoint, vous devez apporter la preuve de cette infidélité par tous les moyens possibles. Vous pouvez bien sûr avoir recours au témoignage (par écrit ou à l’audience), où les familles proches des époux peuvent faire leurs dépositions. Pour certains membres de la famille, les témoignages sont formellement interdits :
Les enfants ne peuvent jamais témoigner contre un de leurs parents ou grands-parents.
Les conjoints des descendants, même s’ils sont divorcés.
Les concubins des descendants etc…
Les preuves admissibles dans une procédure de divorce pour faute
Il est important de noter que les mains courantes et les plaintes n'ont pas de valeur probatoire dans une procédure de demande de divorce pour faute.
De plus les lettres, les cartes postales, les mails, les photographies ou films vidéo, les « SMS » reçus sur un téléphone portable (ou sur une ligne fixe) ne sont recevables que s’ils ont été obtenus sans violence ni fraude, sauf exceptions à cette règle.
Le journal intime du conjoint peut parfois être utilisé comme preuve. Toutefois il arrive que le juge refuse d'en tenir compte, considérant qu’il s’agit d’un document personnel et que le conjoint n'a pas pu en prendre connaissance de manière loyale.
Les constats d'adultère dressés par un huissier sont autorisés, mais uniquement sur autorisation du juge. Toutefois, ils peuvent être exclus des débats s'il y a eu violation de domicile ou atteinte illicite à l'intimité de la vie privée.
Des examens sanguins établissant la non-paternité du père de l'enfant du couple sont tout à fait admissibles en tant que preuve.
En revanche, un rapport d'enquête sociale ne peut pas être utilisé comme preuve et ne sera pas pris en compte par le juge.
Enfin, il est important de noter que c’est au conjoint qui conteste la validité d’une preuve de prouver qu’il a été obtenu par fraude ou par violence. A titre d’exemple, si votre messagerie est protégée par un mot de passe, il vous faudra démontrer que le conjoint qui produit les mails a obtenu ce code d’accès de façon frauduleuse.




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